Mohale Mashigo à la rencontre des élèves de Fameck

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Mohale Mashigo

 

19 janvier 2021

'What does ‘a feminist story’ mean?’

Ce lundi 14 décembre, Mohale Mashigo a passé une matinée en compagnie des élèves d’une classe de première et de terminale au lycée Saint-Exupéry de Fameck. De 9h à 12h, l’auteure a pu échanger sur de nombreux sujets lors d'une rencontre de type questions-réponses.

Les questions étaient d’abord centrées sur une nouvelle extraite du recueil Intruders, que les élèves avaient étudiée en cours : ‘The High Heel Killer’. Cette histoire raconte l’histoire d’une femme qui se venge des hommes abusifs. Au fur à mesure de l'intrigue, des ailes lui poussent dans le dos. Nous apprenons grâce aux questions que cette nouvelle a été écrite pour un journal souhaitant publier une histoire pour ‘honorer’ les femmes lors de la journée internationale des droits des femmes. Mohale explique qu’elle savait que cette nouvelle serait vue comme provocatrice, ce qui était le but, car selon elle, aujourd’hui les gens sont plus choqués par la mort d’un homme que par celle d’une femme, sinon il n’y aurait plus toute cette violence faite aux femmes. Le problème des féminicides est très récurrent dans le monde, notamment en Afrique du Sud. Elle souhaitait donc, grâce à sa nouvelle, switcher les rôles, et au travers de ce récit, montrer que cette peur ressentie par les femmes n’est pas imaginaire : ‘c’est ce que l’on entend dans les journaux, c’est ce que l’on entend lorsqu’on écoute les personnes que l’on connaît’. Pour écrire cette nouvelle, elle s’est inspirée des moments qu’elle a passés à Johannesburg, une ville qu’elle décrit comme bruyante, une ville où on a l’impression d’entendre ce que l’on dit de nous. C’est également une ville où il est d’après elle très difficile d’exister en tant que femme. Elle s’est alors demandé ce qui se passerait si à Johannesburg, une femme ne supportait plus de pouvoir entendre ce que les hommes disaient d’elle, leurs remarques dégradantes et leurs commentaires. Ce qui se passerait si une femme atteignait son point de rupture et décidait de réagir aussi violemment que certains hommes.

‘I wanted to be a million things but writer wasn’t one of them’

Après avoir écouté Mohale discuter de ses engagements pour l’égalité des genres et des ethnies et de sa vie en Afrique du Sud, les élèves ont orienté la conversation vers le processus de création et le travail d’écrivain.e. Grâce à ces moments, nous avons pu apprendre que, d’après elle, pour devenir un.e bon.ne écrivain.e il faut d’abord être un.e bon.ne lecteur.trice. Aussi, elle ne s’identifie pas au genre de l' Afro-futurisme (présent, par exemple, dans l’intrigue de Black Panther dont elle est co-scénariste pour Marvel), mais plus simplement à la "speculative fiction", qui d’après elle est le genre de la fiction africaine contemporaine.

Mohale a pu partager son histoire en tant qu’écrivaine. Son parcours a été rythmé par des découvertes qui marquent encore aujourd’hui ses écrits. Ses parents aiment tous les deux les histoires ; elle qualifie même sa maman de storyteller, et c’est pour cela que son pseudonyme d’auteure comporte 'Mohale', qui est le nom de jeune fille de sa mère. Malgré son enfance dans un environnement rempli de livres qu’elle dévorait, elle ne ‘pensait pas que des personnes comme [elle] puissent écrire’, expliquant qu’en tant que femme noire vivant en Afrique du Sud, les personnages principaux de livres étaient souvent des filles blondes aux yeux bleus et les auteur.e.s majoritairement blancs. À l’âge adulte, elle a découvert de nombreuses œuvres d’auteures africaines qui l’ont inspirée, notamment The Color Purple d’Alice Walker.

En plus d’avoir écrit le roman The Yearning, le volume de nouvelle Intruders, et d’être la scénariste des comics Kwezi, Mohale Mashigo a aussi écrit des livres pour enfants dont Where is Lulu? Les étudiants étaient curieux de savoir ce qui l’intéressait tant dans l’écriture de livres pour enfants, Mohale leur a répondu qu’ ‘écrire pour les enfants est fun ! Ils ont beaucoup d’intuition et ils ont toujours cette magie en eux que le monde n’a pas encore éteinte’.

Le mot de la fin

Malheureusement même les meilleures rencontres doivent prendre fin, et celle-ci a été marquée par la sonnerie du lycée indiquant qu’il était l’heure pour Mohale de rentrer à Nancy.

Avant de partir, elle a tout de même pris le temps de conseiller à chacun un livre qui pourrait lui plaire. Elle a fait un tour de la salle, demandant à chaque élève de lui dire ce qu’il ou elle aimait lire. Certains ont mentionné la fantasy, d’autres les romans romantiques. Un élève a même dit ‘tout’. Quelques élèves ont néanmoins déclaré ne pas aimer lire. Pour Mohale, il est impossible que quelqu’un n’aime pas lire : ceux qui se retrouvent dans cette affirmation n’ont tout simplement pas encore trouvé le genre littéraire fait pour eux. Alors si tu aimes la fantasy, Mohale te conseille Neil Gaiman et Book of Phoenix de Nnedi Okorafor. Si tu aimes l’action et que tu as besoin d'images, tente The Watchmen (ou plus généralement les comics).

S’achève ainsi une matinée en compagnie de Mohale Mashigo : dans la bonne humeur, la tête remplie d’idées, de conseils et surtout de recommandations de livres !

Pauline LAMBINET, L3 LLCER Anglais et Lisa MAZZILLI, M1 Mondes Anglophones

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Mohale Mashigo au lycée St-Exupéry de Fameck